Il y a des mots qu’on préfère éviter, qu’on enveloppe pour ne pas déranger. “Vieillard”, par exemple. Ce mot enferme, il fait penser à la fin, il fait peur, même à ceux qui ne sont pas encore concernés. Alors on invente des formules comme “troisième âge”, “senior”, “personne âgée”, comme si ça changeait quelque chose, comme si ces détours pouvaient faire oublier ce que le miroir finit toujours par nous dire.

Mais le vrai problème, ce n’est pas le mot, c’est ce qu’il renvoie. Vieillir, changer, ralentir un peu, perdre en force peut-être, mais pas en valeur. Dans une société obsédée par la vitesse, la jeunesse et l’apparence, dire les choses telles qu’elles sont est devenu un acte de courage.

Alors je le dis sans détour : je suis vieux, et alors. Je n’ai pas besoin de maquiller le mot. Je l’accepte. Il fait partie de moi, il raconte mon chemin. J’ai vécu, j’ai aimé, j’ai appris et je suis encore debout. Je ne suis pas un ancien qu’on range dans un coin. Je suis là, avec mes souvenirs, mes projets, mes envies, mes colères aussi.

Le mot “vieux” ne me dérange pas. Il ne me définit pas, il me situe. Il dit mon âge, pas ma fin. On peut être vieux et libre, vieux et utile, vieux et plein de vie. Ce n’est pas une plainte ni une provocation, c’est une vérité tranquille, une manière de dire je suis encore là, je n’ai rien à prouver, je ne demande rien, je ne fais plus semblant.

Je suis vieux, et j’en suis fier. On n’a plus besoin de séduire, plus besoin de courir, et quel soulagement, au fond, de pouvoir simplement être soi. Alors non, je ne suis pas un vieillard. Je suis vieux, et je suis vivant.

Et si d’autres ressentent la même chose, qu’ils le disent avec moi, qu’ils le disent fort. Nous, les vieux, on est là. Et on ne laissera plus personne parler à notre place.


Une réponse à « Je suis vieux. Et alors ? »

  1. Avatar de Franck LE COZ
    Franck LE COZ

    Bravo Eric pour ce billet d’humeur qui touche tous les vieux de notre âge et + !

    Dans un monde sociétal où le jeunisme fait sa loi et implique un rejet des anciens, on ressent la notion de vieillesse de façon plus brutale et de plus en plus tôt dans notre parcours de vie.

    Ne dit-on pas dans l’entreprise du 21ème siècle que l’on devient « senior » … après 40 ans ?

    Mais dans ce monde dominé par l’argent et son intense cupidité, on en a fait un marché de ces vieux : la fameuse « SILVER ECONOMY ». Ben oui, il faut que çà rapporte un peu en tant que consommateurs les vieux puisqu’ils ne plus utiles en tant que salariés ou comme collaborateurs !

    Un ami me disait récemment avoir envoyé -à 56 ans- plus de 1 000 lettres de candidatures, pour ne recevoir au final que 4 réponses … négatives . Et l’on voudrait nous faire croire que les seniors sont courtisés par la société, lol !

    Avec un président qui a encore plus enfoncé le marqueur du jeunisme dans son extravagance de « killer économique », notre pays se retrouve dans une ambiguité non disssimulée pour tous ses citoyens : comment tirer un maximum de profits chez les vieux qui consomment, tout en les excluant gentiment du monde du travail et en en laissant aux cheveux gris le soin de se sentir vite inutiles et trop couteux ?

    Une équation bien difficile lorsque l’on considère qu’en 2040, 1 personne sur 2 en France aura plus de 60 ans !

    Ne laissons pas la fenêtre d’Overton https://youtu.be/lIQYumrGsGY?si=boI8rkoI7f5JfJdI se refermer trop vite en se convainquant que, finalement, si l’on éliminait tous ces vieux inutiles à partir d’un certain âge dans une sorte de caroussel de la mort et grâce au crédit social à la chinoise, nous pourrions ainsi éviter bien des dépenses superflues que les jeunes pourraient ainsi se partager. L’idée en séduit déjà beaucoup …

    Le premier ministre Bayrou a déjà bien commencé à nous savonner la planche, en créant un conflit intergénérationnel entre les vieux et les jeunes pour le partage des richesses. Mais qui sera « encore jeune » et qui sera « déjà vieux » dans la société du « consommer toujours plus » de demain ?

    A voir si le curseur ne se déplacera pas trop vite pour faire une nouvelle génération de « jeunes vieux » et de « vieux jeunes » … et ce à partir de 20 ans !

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